Le Guide 2008 arrive en force
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Alsace
Il existe une réelle convivialité des hommes de la région et leurs vins
atteignent une typicité rare, procurant la joie du vin, à des prix qui
ont tendance à monter. Attention à la complexité des terroirs, voire à
l’amalgame entre des crus et des lieux-dits. Il faut rechercher la
fraîcheur et la vivacité, au détriment de vins parfois trop souples,
qui deviennent de plus en plus “douceâtres”. Les millésimes 2005, 2004,
2002 et 2001 sont savoureux, le 2003 a été plus délicat à vinifier (en
Vendanges Tardives, misez sur les 2004, 2001, 2000, 97 ou 89).
Beaujolais
La force du terroir donne une réelle typicité à chaque cru, et les
meilleurs vignerons s’évertuent à sortir de beaux vins, chacun
représentatif du style de son appellation. Pour s’en apercevoir, il
suffit d’objectivité, d’un minimum de connaissance du terrain, de
modestie et de partager l’amour du vin comme le font les producteurs du
Guide. Le 2006 est réussi mais délicat à maîtriser, le 2005 est très
typé, le 2004 est un millésime dense et très aromatique, et le 2003,
trop mûr, beaucoup moins intéressant. En Jura et Savoie, de nombreux
coups de cœur, avec une gamme qui va de la plus grande fraîcheur à la
plus grande complexité.
Bordeaux
Attention aux prix des grands crus 2005, il faut savoir choisir et ne pas se faire avoir.
- Dans le Médoc, la priorité, c’est de laisser s’exprimer son terroir,
en respectant la vigne, en limitant les rendements, en pratiquant la
lutte raisonnée, en laissant faire la nature… Il y a une dizaine
d’années, le travail des vignes avait été délaissé dans certains grands
crus, au profit de la vinification et d’expériences à outrance. Si les
techniques modernes sont souvent remarquables, les propriétaires
traditionnels continuent de faire ce qu’ils savent faire, en se servant
des progrès mais sans masquer leur typicité. De Pauillac à
Saint-Estèphe, de Moulis à Margaux, à Listrac comme à Saint-Julien, en
Haut-Médoc et en Médoc, les coups de cœur sont nombreux. En parallèle,
les prix très exagérés de certains vins renommés sont difficilement
cautionnables, surtout pour le 2005. Misez sur les 2004 et 2002, voire
2001, très classiques, encore trop jeunes à boire, et faites-vous
plaisir avec les 99, 97, 96 ou 90.
- Structure, charme, intensité, distinction, les plus grands vins de
Pomerol sont particulièrement sensibles et marqués par leurs sols, très
diversifiés. Ici, nul besoin de s’escrimer à vouloir abuser de la
barrique neuve ou d’une surconcentration pour faire un grand vin, c’est
le terroir qui prime, et signe la distinction. Les 2004, 2003 et 2002
sont très savoureux (le 2002 peut-être même supérieur), le 2001
remarquable, plus fin, le 2000, superbe.
- À Saint-Émilion, si certains se flattent ici d’élever des cuvées très
“spéciales”, il faut plus que jamais tirer un coup de chapeau aux
propriétaires de talent qui élèvent les véritables grands vins de
Saint-Émilion, satellites compris, du plus grand des grands crus au
plus modeste rapport qualité-prix. On partage avec les propriétaires
retenus dans le Guide le plaisir du vin, la modestie face à la force de
la Nature, et cette convivialité propre à la région. Beaux millésimes
2004 et 2001, éclipsés à tort par les 2003 et 2000. Quelques crus ont
remarquablement réussi le 2003, d’autres beaucoup moins, notamment ceux
qui sont trop “confiturés”. Un certain nombre de crus pratiquent des
prix qui ne sont pas justifiés. Comme dans l’ensemble du bordelais,
débouchez les millésimes 2000 à 90 en ce moment.
- Du plus grand vin au plus abordable, on savoure, du nord au sud de
cette “entité” des Graves, une variété importante de styles de vins.
Des crus réellement exceptionnels, issus des territoires de Pessac,
Martillac, Léognan, mais aussi ceux de Podensac, Portets ou
Saint-Morillon, certains d’entre eux, dans les appellations
Pessac-Léognan comme dans celle des Graves, bénéficiant d’un
remarquable rapport qualité-prix-plaisir. C’est le berceau des grands
vins blancs de la région bordelaise, aux côtés de rouges puissants et
typés. Mes dégustations en Pessac-Léognan comme en Graves, des
millésimes 2005 à 2001, confirment mon Classement des valeurs sûres,
celles où le talent des hommes s’associe à la race du terroir. Gare à
certains prix néanmoins, comme à une concentration outrancière chez
certains, au détriment de la typicité. Les blancs 2004, 2001, 2000, 98
ou 97 sont excellents.
- Il y a de tout dans ces appellations de Côtes, de grands vins racés
et typés comme nous les aimons et d’autres cuvées qui font la part
belle à des vinifications trop sophistiquées, peu propices à mettre un
véritable terroir en avant. Il s’agit donc de savoir miser sur les
hommes et les femmes qui le méritent, assumant la grande tradition
bordelaise depuis des années. Misez sur les millésimes 2005 à 2000,
avec l’opportunité du 2004.
- Mon soutien à l’appellation des Bordeaux Supérieur ne date pas
d’hier. Mes dégustations des millésimes 2005 à 2000 confirment
l’exceptionnel plaisir que procurent aujourd’hui ces vins, même si,
comme ailleurs, la différence des terroirs et l’élevage sont toujours
prépondérants. Attention également aux cuvées trop boisées ou trop
concentrées (et bien trop chères), qui n’ont aucun intérêt. Les
meilleurs tiennent la distance avec des millésimes 98 ou 96, excellents
actuellement.
- A Sauternes, l’équilibre géologique et climatique de la région en
fait un milieu naturel idéal pour cette fascinante biologie qu’est le
Botrytis cinerea, ce minuscule champignon qui a le pouvoir d’augmenter
la teneur en sucre des raisins, aidé par les brumes matinales des
automnes qui précèdent un soleil chaud à midi, favorisant sa
prolifération. Terroir oblige, les crus développent leur propre
spécificité, certains très liquoreux, d’autres tout en finesse, et les
prix sont largement justifiés quand on connaît les efforts et la
patience des propriétaires. Plusieurs millésimes, en dehors du 2002 (où
le plaisir est bien rare), comme les 2001, 99 ou 98 sont de toute
beauté. Le 2003 est réussi, certainement moins typé, et le 2004
particulièrement savoureux et classique. Les plus grandes bouteilles à
leur apogée sont aujourd’hui celles des millésimes 96, 95 ou 89, où
l’on atteint le grand art.
Bourgogne
Ici, on ne s’excite pas à faire des vins “putassiers”, privilégiant ce
qui doit l’être : le terroir et le fruit. L’altitude des vignes,
l’inclinaison des pentes, la richesse des sous-sols en ressources
minérales… Tout concourt donc ici, à faire la différence entre un bon
vin et un vin sublime, et cela explique l’extrême diversité des grands
vins bourguignons, qui leur donne cette typicité unique, où l’élégance
prédomine toujours, en rouge comme en blanc. Élever un grand vin, en
effet, c’est être aussi capable de le partager avec passion et
humilité, et cela ne s’apprend pas. Voici donc ces vignerons talentueux
et passionnés que je soutiens, pour lesquels il n’y a nul besoin de
fioritures ni de vinifications “gonflées”, et dont les prix sont bien
souvent largement justifiés, d’autant que les millésimes 2004, 2003,
2002, 2001, 2000 et 99 sont très savoureux. Exceptionnel 2004, en blanc
comme en rouge, qui côtoie donc un 2003 atypique. Le grand 2005 suit le
2004, dans les 2 couleurs, et demande de la patience. Superbes
bouteilles en blancs dans les millésimes 2000, 99, 95 ou 89, alors que
les meilleurs rouges développent leur attrait dans les millésimes 99,
97, 89 ou 85. Attention, les prix remontent, et certains en profitent
trop, ce quyi explique ma sévérité cette année.
Champagne
On est vraiment au sommet dans la région. Mon Classement est encore
remanié cette année, avec des producteurs qui montent en grade… Cette
hiérarchie vient toujours, et avant tout, récompenser les efforts
accomplis, le talent des hommes et leur volonté qualitative. Un bon
Champagne c’est charmeur, un grand Champagne, c’est toujours un plaisir
exceptionnel, que l’on n’a d’ailleurs jamais pu copier ailleurs. Les
hommes et les femmes, les assemblages et les terroirs font, là comme
partout, toujours la différence. Certains “vieux” millésimes sont
remarquables de fraîcheur et prouvent le potentiel d’évolution des
meilleures cuvées. On trouve de remarquables cuvées à des prix très
justifiés, dans toute la gamme, comparativement à d’autres
appellations, et on comprend le sucès de la région.
Languedoc
Je soutiens les hommes et les femmes qui s’attachent à élever des vins
typés par ces terroirs de garrigues, maîtrisant les rendements,
respectant leur spécificité. Les terroirs ont le potentiel pour que
l’on y élève tout naturellement de grands vins racés, sans vouloir
copier telle ou telle appellation plus connue avec des cépages
inappropriés. Pour certains, l’exagération des prix et certaines
“renommées” bien trop récentes commencent à se dégonfler comme des
baudruches. Les millésimes 2004 et 2003 sont réussis, les 2002 et 2000
savoureux.
Provence
Il faut savoir choisir la bonne adresse ici, se méfier des vins et des
prix de “touristes”, et de la grande cavalerie des rouges et rosés de
bas de gamme que l’on débouche parfois. Ceux qui comptent sont ceux de
ces propriétaires qui laissent s’exprimer au mieux les grands cépages
de la région (Grenache, Mourvèdre, Cinsault, Rolle, Ugni blanc…), dans
ces terroirs complexes, argilo-calcaires, caillouteux, graveleux ou
sableux. Eux élèvent des vins formidables dans toutes les appellations,
en rouge, en blanc et en rosé. Idem pour la Corse. L’influence des
millésimes est beaucoup moins marquée ici, et l’on peut estimer une
très bonne série 2004, 2003, 2002 (un ton en-dessous) et 2001. Les
blancs sont souvent remarquables, et les rosés reviennent à la tête de
ce type de vin (2005 superbe).
Sud-Ouest
S’il s’agit de faire attention aux “microcuvées” qui apparaissent, pas
typées et à des prix incautionnables, les meilleurs vignerons
s’attachent ici à élever des vins racés comme nous les aimons. Les vins
ont une réelle typicité, un potentiel de garde (beaux 99, 95 ou 86) où
les cépages et les sols ont leur influence et une véritable présence
historique. Les millésimes 2004, 2003 et 2001 sont des réussites.
Quelques rapports qualité-prix-plaisir exceptionnels, en rouges, en
blancs secs et en liquoreux (millésimes 2004, 2000, 95 ou 90).
Val de Loire
De la Touraine au Pays Nivernais, du Pays Nantais à l’Anjou-Saumur, la
typicité s’allie à un rapport qualité-prix régulièrement remarquable et
tout concourt au plaisir du vin. Les hommes élèvent des vins à leur
image. Pour les blancs secs, de très grandes bouteilles en Pouilly-Fumé
comme à Vouvray, à Sancerre comme à Savennières ou à Saumur. Les
liquoreux sont exceptionnels, notamment en Coteaux-du-Layon ou Vouvray,
et les rouges associent charpente et fraîcheur, du plus souple
(Touraine, Bourgueil, Sancerre…) au plus charnu (Chinon,
Saumur-Champigny…), des vins qui s’apprécient jeunes mais savent aussi
garder la distance (remarquables 2000, 98 ou 95). Le millésime 2002 est
très réussi en blancs, difficile en rouges, et les 2004, 2003 et 2001
sont savoureux. Beaux liquoreux en 2004, 2003 et 2001, et un millésime
2005 très typé, très prometteur.
Vallée du Rhône
De Vienne en Avignon, les vins rouges et les blancs, du plus
prestigieux au plus méconnu, sont denses, racés et chaleureux, et, pour
la plupart, bénéficient d’un très beau rapport qualité-prix-typicité.
Viennent alors se rejoindre la convivialité, le terroir, et la main de
l’homme, qui font toujours la différence. Le millésime 2003 est parfois
très mûr, le 2002 a été très difficile à maîtriser, et le 2004 très
classique, très réussi. Il faut aussi prendre le temps de conserver ces
vins, car on débouche de grandes bouteilles actuellement dans des
millésimes comme 98, 95, 90 ou 85, voir la Vintage Code ©, page 37.
© Voir le GUIDE DUSSERT-GERBER DES VINS DE FRANCE 2008 (Editions Albin Michel).